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Travail et emploi

Est-il possible de posséder et de cultiver des plantes de cannabis à domicile au Québec?

  • Marianne Bessette
Par Marianne Bessette Avocate
Le 3 septembre dernier, la Cour supérieure du Québec¹ a déclaré invalide l’interdiction totale au Québec, en vertu des articles 5 et 10 de la Loi encadrant le cannabis², de posséder et de faire la culture à domicile de plantes de cannabis.

Il est donc maintenant permis au Québec de posséder et de cultiver, à domicile, jusqu’à 4 plantes de cannabis dans le cadre des limites de la Loi sur le cannabis1 du gouvernement fédéral, sauf si cette décision de la Cour supérieure est infirmée par la Cour d’appel ou jusqu’à ce que le législateur québécois adopte un nouvel encadrement plus strict mais conforme à cette décision, entre autres.

Cette déclaration d’invalidité par la Cour supérieure découle des règles relatives au partage des compétences entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux dont, notamment, sur la manière dont ces gouvernements peuvent adopter des lois.

Essentiellement, la Cour supérieure a déclaré que les dispositions 5 et 10 de la Loi encadrant le cannabis, reproduites ci-après, sont invalides sous leur forme actuelle, car elles relèvent du pouvoir fédéral de légiférer en droit criminel et représentent donc une « législation déguisée » (seul le gouvernement fédéral peut légiférer en droit criminel) :

«  5. Il est interdit d’avoir en sa possession une plante de cannabis.

Quiconque contrevient aux dispositions du premier alinéa commet une infraction et est passible d’une amende de 250 $ à 750 $. En cas de récidive, ces montants sont portés au double. »

« 10. Il est interdit de faire la culture de cannabis à des fins personnelles.

Cette interdiction de culture s’applique notamment à la plantation des graines et des plantes, la reproduction des plantes par boutures, la culture des plantes et la récolte de leur production.

Quiconque contrevient aux dispositions du premier alinéa en faisant la culture de quatre plantes de cannabis ou moins dans sa maison d’habitation commet une infraction et est passible d’une amende de 250 $ à 750 $. En cas de récidive, ces montants sont portés au double.

Aux fins du troisième alinéa, une «maison d’habitation» a le sens que lui donne le paragraphe 8 de l’article 12 de la Loi sur le cannabis (L.C. 2018, c. 16). »

Selon la Cour supérieure, l’adoption par le législateur québécois de ces dispositions est un « retour en arrière » qui impose une interdiction absolue d’une pratique pourtant légalisée, car cette pratique serait de nature à saper des valeurs morales et à créer des maux pour la santé et la sécurité publique. En effet, après une étude des débats parlementaires, notamment, la Cour supérieure a jugé que le législateur québécois a cherché, par ces dispositions, à réprimer une activité dorénavant licite (pour éviter sa banalisation) et à renforcer le droit criminel afin que la légalisation du cannabis soit plus progressive.

La Cour supérieure reconnait toutefois que le législateur québécois aurait pu encadrer autrement la possession et la culture à domicile de plantes de cannabis afin de protéger la santé et la sécurité de la population (conformément à sa sphère de compétence), possiblement en imposant une certaine limite qui ne serait pas une interdiction totale ou en visant des endroits particuliers ou des catégories de personnes, sous réserves des motifs justifiant ces mesures.

Nous allons voir, dans les prochains jours, si la procureure générale du Québec décidera de porter cette décision de la Cour supérieure en appel. Au moment d’écrire ces lignes, nous n’avons constaté aucune déclaration d’appel.

À tout événement, ce jugement risque d’être analysé attentivement par le gouvernement québécois considérant le présent projet de Loi no. 2 sur la Loi resserrant l’encadrement du cannabis2, lequel peut faire l’objet de modifications et n’est pas encore une loi en vigueur. Il sera donc intéressant de suivre ce que le gouvernement Legault pourrait entamer comme démarche pour empêcher que certaines dispositions législatives, découlant éventuellement de ce projet de loi, ne soient à leur tour contestées ou déclarées invalides par les tribunaux.

* Cet article a été rédigé en collaboration avec Tirisa Shearzad, stagiaire en droit. *


1Murray Hall c. Procureure générale du Québec, 2019 QCCS 3664.

2 Loi encadrant le cannabis, RLRQ, c. C-5.3, art. 5 et 10.

3Loi sur le cannabis, L.C. 2018, c. 16, art. 8 et 12.

4Loi resserrant l’encadrement du cannabis, projet de loi n° 2 (étude détaillée – 3 septembre 2019), 1re sess., 42e légis. (Qc).

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