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Disciplinaire et professionnel

Entre automatisation d’actes juridiques et exercice illégal de la profession

Chambre des notaires du Québec c. Compagnie d’assurances FCT ltée¹

La Cour d’appel2, il y a quelque temps, a tranché la question épineuse des contrats automatisés et de l’incidence que ceux-ci pouvaient avoir sur les actes réservés aux avocats et notaires.

Les faits

Les intimées sont des compagnies d’assurance qui offrent, accessoirement à leurs services en assurance, des services de traitement de données et de documents concernant des actes juridiques et autres documents pertinents lors de refinancements hypothécaires. Les appelants, soit le Barreau du Québec et la Chambre des notaires du Québec, reprochaient aux intimées de laisser poser des actes du ressort exclusif de leur profession à des employés non membre de leur ordre. Afin de produire les actes, les compagnies d’assurance utilisent un outil informatisé. La Cour a d’ailleurs procédé à une analyse de cet outil, ce point de la décision faisant l’objet d’un article distinct.

1. Les actes sous forme notariée

Les appelants alléguaient que le Code civil du Québec3 prévoit que les notaires ont le droit exclusif de recevoir les actes notariés, ce droit comprenant également le droit exclusif de les rédiger. Toutefois, la Cour d’appel mentionne que la réception d’un acte d’hypothèque ne peut pas impliquer sa rédaction, puisqu’elle est également du ressort exclusif des avocats. Ce sont certaines formalités essentielles qui devront être remplies par les notaires, notamment, l’identification des parties et l’apposition des signatures.

2. Document affectant un immeuble et nécessitant l’inscription ou la radiation d’inscription

Aucune disposition dans les lois ne confère aux avocats ou aux notaires le droit exclusif de préparer et rédiger des contrats; le seul droit exclusif leur étant conféré est celui de préparer la rédaction pour autrui de documents comme les testaments, les contrats ou les documents affectant des immeubles pouvant être publiés au registre foncier du Québec. Toutefois, les baux ne sont pas assujettis à ce droit exclusif.

La Cour d’appel en vient à la conclusion que les activités des intimées ne contreviennent pas à la Loi sur le Barreau4 ni à la Loi sur le notariat5 (ci-après appelées « Lois »). Les actes d’hypothèques et les actes de subrogation hypothécaires en cause sont des contrats rédigés par des avocats ou des notaires à l’emploi des intimées. Le débat est plutôt sur l’inscription d’informations particulières comme les noms et les numéros de cadastre. Ce qui constitue la tâche d’un notaire ou d’un avocat dans ce contexte, c’est la vérification des informations pertinentes à la transaction et l’identification des problèmes juridiques qui pourraient en découler. Toutefois, l’entrée de données peut très bien se faire par une personne non juriste parce qu’en l’espèce, deux vérifications sont effectuées : une par les intimées et une autre par un notaire instrumentant. Le notaire instrumentant agit pour les parties à l’acte et non pour les intimées. Les informations colligées dans les plateformes informatiques des intimées sont vérifiées par le notaire instrumentant. La seule exception à cette double vérification est la quittance. Toutefois, ce sont les créanciers déchargés sur paiement qui sont obligés de fournir les quittances6.

3. Avis juridiques

Les intimées effectuent des recherches sommaires de titres et, lorsqu’un problème est détecté, elles en informent les institutions financières et leur présentent des solutions possibles. Pour l’une des intimées, ce sont des techniciens sous la responsabilité d’un notaire qui procèdent à ces vérifications, tandis que pour l’autre, cette vérification est faite par un cabinet externe. La Cour d’appel conclut que le fait d’effectuer un examen du registre immobilier et d’y déceler un problème ne relève pas d’un exercice exclusif.

Le fait d’informer quelqu’un d’un problème de titre potentiel sans émettre d’opinion à cet effet ne relève pas de l’exercice exclusif de la profession d’avocat ou de notaire. Les intimées en procédant de la sorte ne donnent pas une opinion juridique au sens des Lois, elles ne font que soulever un problème potentiel et le porter à l’attention des institutions financières qui, par la suite, en informent leurs clients. Ces vérifications sont faites dans le but d’obtenir l’émission d’une police d’assurance titres et non dans le but d’obtenir une opinion sur les titres.

Analyse de la décision

La Cour d’appel présente un tour d’horizon relatif à certains actes posés qui sont du ressort exclusif des notaires et des avocats. On peut constater que la ligne, bien qu’elle soit généralement claire, est toutefois mince entre ce qui constitue un acte réservé ou de l’exercice illégal. Il est possible d’émettre le constat que les actes exclusifs requièrent un niveau de complexité plus élevé que la collecte ou l’entrée de données, ce qui permet au professionnel de se concentrer sur des tâches à valeur ajoutée. Au final, il est acceptable que les tâches qui relèvent davantage de la collecte et de l’entrée de données soient confiées à une personne physique non membre d’un ordre ou automatisées à l’aide d’un outil informatique, en autant que la validation des informations, l’identification de problèmes juridiques ainsi que les opinions juridiques soient faites par un professionnel du droit.


12018 QCCA 1362.
2Id.
3RLRQ c. CCQ-1991.
4 RLRQ c. B-1.
5 RLRQ c. N-3.
6Préc. note 3, art. 1697.

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