Restez informé de nos articles les plus récents, nos activités de formation et offres d'emploi.

Infolettre Therrien Couture Joli-Coeur

Restez informé de nos articles les plus récents, nos activités de formation et offres d'emploi.

Écrivez-nous

En remplissant ce formulaire, vous permettez à notre équipe de saisir pleinement vos besoins et de vous offrir le service le plus adapté à vos attentes. Merci de votre confiance, nous nous engageons à vous fournir un suivi dans les plus brefs délais.

Administratif

Un gestionnaire d’immeuble ne peut représenter une société en nom collectif devant la Régie du logement

Est-ce qu’une gestionnaire d’immeuble, nommée dirigeante pour la locatrice, peut agir valablement comme mandataire d’une société en nom collectif devant les tribunaux?

C’est la question préliminaire qu’a tranchée la Régie du logement (ci-après la « Régie ») dans la décision Anne-Marie Gaudet c. SNC BBL, 2015 QCRDL 3079. La particularité de cette dernière décision est que la Régie contredit et se distingue du jugement déclaratoire que la Cour supérieure a rendu le 4 août 20141

Le jugement déclaratoire de la Cour supérieure

La Cour supérieure devait déterminer si un gestionnaire d’immeuble pouvait représenter une société en nom collectif devant la Régie. La Cour a considéré que comme la Régie est un tribunal administratif indépendant édictant ses propres règles de procédure, il doit y avoir une certaine souplesse administrative. Ainsi, la Cour supérieure considère qu’un gestionnaire d’immeuble pourrait agir comme mandataire et représenter la société devant la Régie du logement.

La décision de la Régie du logement

Bien que le jugement déclaratoire de la Cour supérieure semble avoir réglé l’incertitude, la Régie interprète les dispositions législatives applicables et en arrive à une toute autre conclusion. D’abord, la Loi sur la Régie du logement prévoit les cas de représentation pour une personne physique ou une personne morale2 et il est désormais établi qu’une société en nom collectif ne peut être qualifiée de personne morale3. La Loi prévoit également que si une partie est représentée par un mandataire autre que son conjoint ou un avocat, le mandat doit être à titre gratuit4. Il n'a pas été démontré que le mandat en question était accompli gratuitement. La Régie considère d’ailleurs qu’il serait étonnant qu’une gestionnaire d’immeuble ne soit pas rémunérée pour accomplir cette tâche. Comme la situation en cause n’est prévue par aucun des articles de la Loi sur la Régie du logement, la Régie réfère aux articles du Code de procédure civile5, aucun règlement ou loi ne s’y opposant. Le Tribunal interprète donc l’article 61 du C.p.c. qui prévoit que « Nul n’est tenu de se faire représenter par procureur devant les tribunaux, hormis : […] e) les sociétés en nom collectif ou en commandite et les associations au sens du Code civil, à moins que tous les associés ou membres n’agissent eux-mêmes ou ne mandatent l’un d’eux; ». La Régie considère également l’article 128 de la Loi sur le Barreau6 lors de son analyse, prévoyant qu’il est du ressort exclusif de l’avocat de plaider ou d’agir devant tout tribunal, sauf devant la Régie du logement.

Après cette analyse, la Régie affirme ne pas se sentir liée par la règle du précédent et distingue le jugement déclaratoire de la Cour supérieure. Elle considère que les règles de représentation sont d’ordre public et que l’article 61 C.p.c. n’est pas une simple règle de procédure, mais bien une règle de fond qui lui est applicable. Ainsi, selon cet article, les sociétés en nom collectif ne peuvent agir devant les tribunaux que par avocat ou par les associés eux-mêmes, qui sont mandatés à cette fin. 

La Régie se demande pour quelle raison elle devrait se distancer des principes de représentation des tribunaux supérieurs et agir avec plus de souplesse, sous prétexte qu’elle est un tribunal administratif. Par conséquent, comme la gestionnaire d’immeuble n’étant pas avocate, ni une associée de la société en nom collectif ou une mandataire à titre gratuit, elle ne peut agir et représenter la société devant la Régie. Par cette décision, la Régie du logement vient donc renverser l’interprétation de la Cour supérieure. 

Par conséquent, nous invitons les gestionnaires d’immeuble à la plus grande prudence lorsqu’il s’agit d’agir devant la Régie du logement. Si les associés de la société en nom collectif ne sont pas présents, il vaudrait mieux être représenté par un avocat.

1 L.R.M. c. Société Parc de la vigie et Logisco, 2014 QCCS 3916.
2 Loi sur la Régie du logement, L.R.Q., c. R-8.1, art. 72.
3 Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64, art. 2188; Ville de Québec c. Compagnie d’immeubles Allard limitée [1996] R.J.Q. 1566. 
Loi sur la Régie du logement, préc., note 2, art. 74.
5 RLRQ, c. C-25, art. 55 à 65. 
6 RLRQ, c. B-1.

0