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Disciplinaire et professionnel

Pas de demi-mesure en matière de fardeau de preuve

Le droit disciplinaire est un droit particulier qui s’inspire à la fois du droit civil et du droit criminel.

S’il constitue en quelque sorte un hybride aux contours indéfinis, la Cour supérieure1 a récemment rappelé qu’on ne peut pas y appliquer un fardeau de preuve différent des standards déjà bien établis et qu’il n’y a pas place aux demi-teintes. 

Il n’est pas rare qu’un professionnel visé par une plainte disciplinaire invoque que la plaignante n’a pas rempli son fardeau de preuve puisqu’elle n’a pas présenté une preuve claire et convaincante surpassant la simple prépondérance de probabilités. Une telle approche sous-entend que la preuve devant mener à la culpabilité du professionnel doit s’approcher du standard de la preuve hors de tout doute raisonnable qui prévaut en droit criminel, mais avec quelques bémols. 

La Cour supérieure a cependant rejeté cette tendance, rappelant que la Cour d’appel2 et même la Cour suprême3 n’ont jamais reconnu d’autres fardeaux de preuve que celui de la preuve par prépondérance des probabilités prévalant en droit civil et celui de la preuve hors de tout doute raisonnable applicable en droit criminel. 

Le fait d’invoquer et d’exiger une preuve claire et convaincante n’a pas pour effet de créer un standard mitoyen4. Au contraire, en matière de prépondérance des probabilités, toute preuve se doit de répondre à ces qualificatifs pour que le juge décide en faveur d’une partie plutôt que de l’autre. Une cour d’appel devra donc considérer que si le juge a penché d’un côté, c’est qu’il a considéré que cette partie lui a présenté une preuve claire et convaincante, et rien d’autre5

Le juge rappelle ainsi à l’ordre le Tribunal des professions qui avait indiqué dans la décision en appel qu’en présence d’une preuve laissant place à une quelconque ambiguïté, cette ambiguïté devait profiter au professionnel visé par la plainte. Le Tribunal des professions avait aussi indiqué que si les deux théories présentées par les parties s’équivalaient, la plainte disciplinaire devait être rejetée. 

Or, une telle façon de voir les choses et d’apprécier la preuve présentée devant le Conseil de discipline impose à la plaignante un fardeau de preuve s’approchant dangereusement de la preuve hors de tout doute raisonnable, applicable en droit criminel et pénal seulement. 

La Cour supérieure rappelle ainsi que le devoir de la plaignante en matière disciplinaire est de faire la preuve que sa théorie est plus probable que celle du professionnel visé par la plainte disciplinaire, sans plus. Le fait d’indiquer que cette preuve doit être de haute qualité, claire et convaincante ne permet pas de moduler le fardeau de la preuve et n’a pas pour effet d’augmenter le fardeau de la preuve à faire.

Cette même décision rappelle aussi qu’il ne revient pas au décideur révisant une décision rendue par un Conseil de discipline d’évaluer si la preuve présentée supporte juridiquement la décision rendue. Une telle façon de faire éclipserait la déférence qui doit être accordée au décideur de première instance.  

Cette mise au point réduira-t-elle les ardeurs de certains qui n’hésitent pas à attaquer le poids de la preuve présentée par le plaignant disciplinaire pour demander la révision de la décision en invoquant que la prépondérance des probabilités n’est pas suffisante? C’est ce que l’avenir nous dira, d’autant plus qu’une permission d’en appeler a été accordée le 28 août dernier6.

1Gauthier c. Bisson, 2014 QCCS 2821, ci-après « Gauthier c. Bisson ».
2Laplante c. Séminaire de Québec, 2005 QCCA 1118.
3F.H. c. McDougall, [2008] 3 R.C.S. 41.
4Gauthier c. Bisson, au para. 78.
5Gauthier c. Bisson, au para. 79.
6500-09-024560-146.

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